« Je est un autre », disait Arthur Rimbaud. Et si j’étais moi… Surtout quand la fable est hallucinée, qu’elle invite à résister à l’idéologie dominante et à se moquer de son époque. Ici, le metteur en scène Mathias Simons prend le pouvoir. Et c’est tant mieux ! Il se prête pour l’occasion au jeu du portrait chinois. À la fois poétique et singulièrement ancré.

Si j’étais un animal, je serais le chimpanzé
Si j’étais une fleur, je serais la rose rouge
Si j’étais un élément, je serais le feu
Si j’étais une pierre précieuse, je serais l’émeraude
Si j’étais une saison, je serais l’automne
Si j’étais un moment de la journée, je serais le matin
Si j’étais un des cinq sens, je serais l’ouïe

Si j’étais un pays, je serais la Grèce
Si j’étais une ville, je serais New York
Si j’étais une planète, je serais la terre, les autres sont inhabitables
Si j’étais un paysage, je serais le paysage où se mêlent forêt de feuillus, bocage et prairie
Si j’étais une pièce de la maison, je serais le bureau

Si j’étais un objet du quotidien, je serais l’ordinateur
Si j’étais un véhicule, je serais la voiture, la berline
Si j’étais un vêtement, je serais le jeans

Si j’étais un album de musique, je serais L’homme à tête de chou de Gainsbourg
Si j’étais un personnage de fiction, je serais Antigone
Si j’étais un mot, je serais « résister »
Si j’étais un film, je serais Mulholland Drive de David Lynch
Si j’étais une célébrité, je serais Noam Chomsky
Si j’étais un dessin animé, je serais Tom & Jerry
Si j’étais un super pouvoir, je serais le don d’invisibilité
Si j’étais une créature légendaire, je serais une gargouille
Si j’étais une chanson, je serais Alabama Song (Whisky bar) de The Doors
Si j’étais un style de musique, je serais le rock
Si j’étais une photo, je serais une des photos de Marie-Hélène Balau qui photographie les gens ordinaires
Si j’étais un art, je serais le théâtre
Si j’étais un événement historique, je serais la Commune de Paris

Si j’étais un plat, je serais la raclette
Si j’étais un dessert, je serais le Tiramisu
Si j’étais une friandise, je serais la pâte d’amande
Si j’étais un fruit, je serais la banane
Si j’étais une boisson, je serais l’eau gazeuse
Si j’étais une odeur, je serais l’odeur de la terre mouillée un soir d’été

Si j’étais un sport, je serais le football
Si j’étais une fête, je serais une fête de dernière quand ça s’est bien passé
Si j’étais un chiffre, je serais le 12

Si j’étais un bruit, je serais le bruit du vent dans les pins
Si j’étais une devise, je serais « ni dieu ni maître »
Si j’étais un hashtag, je serais #jeprendsledroit
Si j’étais une mauvaise habitude, je serais la cigarette
Si j’étais une qualité, je serais le collectif
Si j’étais un gros mot, je serais « merde »
Si j’étais une émotion, je serais entre la joie et la colère
Si j’étais un plaisir, je serais le repas entre ami·es
Si j’étais un désir, je serais que le monde change

Propos recueillis par Sylvia Botella en novembre 2022