Du théâtre d’artiste… à la française
Jean-Claude Drouot
Direction 1985•1990
« En ce qui concerne la programmation, mon projet fut d’ouvrir nos spectacles à la littérature étrangère (…). C’est ainsi que je fis venir Matthias Langhoff (…) Thomas Bernhard, (…) ou encore Anatoli Vassiliev(…). Je dirigeai avec Pierre Laroche le Gengis Khan de Henri Bauchau. Un autre temps fort de ma programmation fut La Princesse Maleine de l’auteur belge Maurice Maeterlinck. Je considère que j’ai présenté avec Maleine ma mise en scène la plus personnelle, la plus intime (…). Enfant de Vilar j’ai eu à cœur de perpétuer une relation entre le public et les grandes œuvres du répertoire parce que ces œuvres nous parlent de l’expérience humaine, parce que le théâtre est selon moi le lieu de la vraie présence.(…) Un homme de théâtre, voilà ce que j’étais, ce que j’entendais être, quand bien même je dirigeais un établissement public. »
Jean-Claude Drouot, Le Cerisier du Pirate, Mémoires, l’Archipel 2015
Celui qu’on appelle « le belge de France » car il y a fait toute sa carrière, notamment d’acteur populaire à la télévision, va assumer le rôle difficile de transition entre la direction Huisman qui a duré 40 ans et la suite de l’histoire du Théâtre National. Drouot reste 5 ans (de 1985 à 1990) à la tête de l'institution et doit faire face aux énormes dettes qui pèsent sur le théâtre à cette époque.
Jean-Claude Drouot refuse d’emblée ce rôle de gestionnaire prudent. Il préfère supprimer le Festival de Spa et une partie des Semaines de fête (festivals organisés en partenariat avec un Centre Culturel), jugés trop chers. Il entend proposer un théâtre à dimension poétique, un théâtre « élitaire pour tous » comme le prônait Antoine Vitez – dont il accueillera en 1987 la formidable mise en scène du Soulier de satin de Claudel.
Les goûts de Jean-Claude Drouot se portent sur des grandes productions avec de nombreux·ses comédien·nes dont certaines sont mises en scène par lui-même. Kean d’Alexandre Dumas (dans une adpatation de Jean-Paul Sartre), avec laquelle il ouvre son quinquennat ou Gengis Khan, d’après Henri Bauchau, avec 19 comédien·nes (qui jouaient presque tous·tes deux rôles). Ces « grosses machines » qui ne pouvaient pas tourner dans les petites salles de province ont pourtant trouvé une vie sur les grandes scènes françaises, comme à la Comédie de Saint-étienne, qui a coproduit le projet Gengis Khan.
Il remplace aussi les tournées « de prestige » sur d’autres continents par de véritables partenariats avec des scènes internationales et une implantation réelle du Théâtre National dans les pays visités.
Par ailleurs, il ouvre durant 2 ans l’ancienne salle de l’Ensemble Théâtral Mobile de Marc Liebens pour en faire un lieu de théâtre plus expérimental. Pour des raisons financières encore, l’expérience ne sera pas renouvelée.
« On avait besoin d’un lieu alternatif, différent des salles du National, où l’on pouvait se livrer à de vraies expérimentations théâtrales sur de petites formes. On y déchiffrait des écritures nouvelles plutôt que de s’installer dans la routine et l’académisme, on ouvrait de nouvelles pistes… »
Alternatives théâtrales 1985-2005
Un homme de plateau
Kean, un spectacle pour un homme de plateau
Kean d’Alexandre Dumas (dans une adaptation de Jean-Paul Sartre), une mis en scène par Jean-Claude Drouot, raconte l’histoire d’Edmund Kean, grand acteur shakespearien qui mena une vie dépravée et mourut à demi-fou, ivrogne et criblé de dettes en 1833. Alexandre Dumas fait du « meilleur comédien du monde », un héros romantique torturé, en proie aux contradictions liées à son métier. Ce spectacle est par excellence celui d'un homme de plateau - ce que Drouot a toujours revendiqué avant toute chose. Il y en endosse d'ailleurs le rôle-titre. Créé à Spa en 1986.
Le Géomètre et le Messager d’après Le Château de Kafka dans une mise en scène d’Isabelle Pousseur : la première présence du Théâtre National à Avignon
C’est le premier spectacle du Théâtre National à être présenté au Festival d'Avignon, en 1988.
L’apport de Jean-Claude Drouot dans la reconnaissance internationale du Théâtre National et dans le système des coproductions est évident. Le Géomètre et le Messager a été coproduit par le Théâtre Océan Nord, l’Eté Marseillais, le Festival d’Avignon et le Théâtre de la Place à Liège. Le spectacle eut droit à une longue tournée en France et en Suisse.
C’est le deuxième spectacle mis en scène par Isabelle Pousseur au Théâtre National, qui jusqu'ici, n'y a monté pas moins de 9 pièces. Cette saison 2025, la metteuse en scène nous revient avec sa nouvelle création Du côté de chez Elle(s).